Lorsque j'étais enfant, mes seuls contacts avec une Eglise, c'était lorsque j'étais avec mes grands-parents, en Valais, et que nous allions à la messe. Je m'y ennuyais beaucoup et cela m'a laissé une mauvaise image de l'Eglise.
Lorsque ma famille a déménagé dans la région de Nyon, je me suis fais un copain qui est devenu un ami : Jérémie. Celui-ci m'a parlé d'un groupe de jeunes appelé Ado-ok (1). Il m'a expliqué que ce groupe se réunissait toutes les deux semaines, qu'il y avait à manger et que c'était gratuit. J'étais étonné que des gens soient aussi généreux sans raison apparente.
Jérémie m'a proposé de venir à ce groupe. Je me rappelle de la première fois où je me suis trouvé devant la porte, en me demandant si c'était une blague. D'autres jeunes entraient, j'ai fait de même. J'ai entendu des témoignages de personnes qui vivaient des choses incroyables avec Dieu. Cela m'a poussé à revenir et à réfléchir à l'existence de Dieu. J'ai commencé à lire la Bible et à prier.
Les responsables du groupe de jeunes ont organisé un camp pendant les vacances. J'ai décidé d'y participer, et c'est là que j'ai répondu à un appel et donné ma vie à Dieu.
Lors d'un atelier destiné à nous aider à découvrir le plan de Dieu pour nos vies, il y a eu un temps de prière. A ce moment, j'ai eu comme l'image de deux planètes, l'une très chaude et l'autre très froide. Un peu plus tard, en soirée, nous avons eu une réunion durant laquelle un texte de l'Apocalypse a été lu : « Je sais que tu n'es ni froid, ni bouillant. Ah! si seulement tu étais froid ou bouillant ! » (Ap 3.15). A ce moment, j'ai eu la conviction que Dieu me parlait.
Faire preuve de persévérance
Au retour de ce camp, j'ai entendu parler de l'organisation Opération mobilisation (OM) qui proclame l'Evangile de ports en ports, grâce à son bateau. A la fin du message, j'ai lancé à mon ami Jérémie qui se trouvait aussi là : « Après le gymnase, on ira une année avec OM ! »... C'est ce qui s'est passé trois ans plus tard, une fois le gymnase terminé. Et cela a été un école de la foi.
Au moment de nous inscrire, nous pensions nous engager pour deux mois et demi. Mais cela n'a pas été possible et nous sommes revenus au plan initial : un engagement d'une année entière. Le problème était que je n'avais pas de quoi payer mon voyage et mon séjour. Dès la fin du gymnase, j'ai donc travaillé afin de gagner de quoi financer mon année.
Malheureusement, trois semaines avant la date du départ, OM m'a informé que je n'avais pas réuni assez d'argent pour pouvoir partir. L'organisation a annulé mon inscription et, du coup, mon groupe de soutien a commencé à prendre ses distances par rapport au projet. J'étais à la fois désespéré et convaincu que Dieu m'appelait à cet engagement d'un an. En désespoir de cause, j'ai écrit à une responsable d'OM en joignant un budget détaillé. Touchée par ma lettre, cette personne a réactivé mon inscription.
Dès ce moment, tout est allé très vite. En une semaine j'ai reçu tout le soutien financier dont j'avais besoin. Dieu avait répondu de façon parfaite... tout en me réservant d'autres difficultés.
Avec mon ami Jérémie, j'ai embarqué sur le bateau nommé Logos Hope. Lui a été affecté à la cuisine et moi à la salle des machines. Chaque semaine, durant cinq jours, je travaillais à la maintenance du navire. Un autre jour était réservé au « ministère », c'est-à-dire à une action de témoignage et d'évangélisation. J'avais aussi un jour de congé.
Des défis à relever
Mon premier défi a été de me retrouver presque toute la semaine dans la salle des machines, plié en quatre, transpirant dans une chaleur suffocante, dans l'impossibilité de parler aux autres à cause du bruit, avec l'interdiction d'écouter de la musique... On m'a donné un pot de peinture, un pinceau et beaucoup de travail. Je me suis trouvé confronté à moi-même pendant de longues heures et j'ai souffert d'un ennui profond. Je me sentais peu efficace, dévalorisé, tout petit.
J'ai dû accepter que Dieu m'utilise comme il le voulait et appris à travailler de mon mieux pour glorifier Dieu. Cela m'a permis de prendre conscience de l'importance de la complémentarité dans une équipe... et d'apprendre à aimer mon travail.
Mon deuxième défi a été celui de la vie en commun. Sur le bateau, nous étions 400 personnes provenant de 60 pays. Il fallait partager les chambres, accepter des coupures d'eau lorsqu'on sortait du travail avec une odeur de mazout, rester agréables lorsqu'on avait pas assez dormi les nuits précédentes... et aller louer Dieu ensemble. Dans cette situation, je n'avais plus de patience. C'était l'une des premières fois de ma vie où j'ai eu de la peine à m'entendre avec mes camarades. C'était désespérant !
Mon troisième défi, ce fut les moments de « ministère ». Nous allions à la rencontre de la population avec des programmes d'entraide et de témoignage pour adultes et pour enfants. Les fois où je me suis retrouvé chef d'équipe ont parfois été difficiles. Les choses ne se passaient pas comme prévu. Il m'a fallu ravaler ma fierté.
Je me souviendrai longtemps de l'expérience « Challenge Team ». Nous avons été envoyés à la rencontre de populations perdues dans la nature. La marche, le manque de sommeil, la nourriture très légère et la vie de groupe combinés à la nécessité d'apporter un message spirituel m'ont poussé au-delà de mes limites. Nous avons dû beaucoup compter sur Dieu.
En me rappelant de l'image des deux planètes, reçue au début de ma vie chrétienne, je me rend compte que Dieu m'a fait progresser dans plusieurs domaines de ma vie : la détermination dans ses choix, le sens du service, l'amour du prochain, la foi mise en pratique, l'Evangile qui s'incarne dans nos vies...
Viktor Crettenand
Note
(1) Ado-ok est le groupe d'adolescents chrétien de l'Eglise évangélique La Fraternelle (FREE), à Nyon. Il rassemble 30 à 50 jeunes, deux fois par mois, dans la ferme de la famille Bidaux, à Grens près de Nyon.