Lors de notre voyage au Maroc, en mars dernier, il est des rencontres typiques, qui dessinent une situation spirituelle et sociale. Grâce au téléphone portable, nous avions établi un contact avec un homme, un ami chrétien, que nous voulions visiter pour l'encourager et pour lui remettre un peu de matériel audio. Ce faisant, nous espérions qu'il puisse grandir dans la foi et écouter les émissions de Trans World Radio (TWR). Mais comment entrer en contact sans le compromettre? Et lui qui désire nous recevoir dans sa maison...
La joie de la communion fraternelle
Imaginez une médina, une de ces vieilles villes du Maghreb, entourée de murs ‘ fortificateurs’. L'ami est venu sur la place extérieure et nous attend. Il nous conduit dans un dédale de petites rues très étroites, assez proprettes. On devine des regards interrogateurs d’hommes vêtus de sombre et des femmes voilées en djellaba. Une petite porte nous fait entrer dans une cuisine haute et étroite d'où part un escalier étroit, avec des marches irrégulières et hautes. A l'étage, notre ami nous fait asseoir dans l'unique pièce qui, la nuit, abrite les parents, leurs 4 enfants et 3 autres enfants accueillis, presque adoptés. Dans le regard de cet ami, on peut lire toute la joie de nous accueillir, ainsi qu'une immense fierté. Les paroles d'encouragement, le texte biblique lu, quelques conseils et notre échange font de ce moment un temps de communion fraternelle, de communion des saints.
Quand nous repartons, nous retrouvons les mêmes rues, les mêmes regards curieux, les mêmes sentiments. Devant la voiture, deux ou trois policiers surveillent. Notre ami nous dit au revoir, mais nous nous sommes entendus pour lui donner du matériel dans une petite rue éloignée, à l'abri des délateurs et des policiers. Il ne faut pas compromettre cet ami. Et ce d’autant plus que ces quelques cadeaux de littérature biblique, d'habits pour ses enfants, de CD sont les bienvenus pour son ministère et pour sa famille.
Voilà, c'est une personne de l'Eglise souterraine marocaine qui comprend un grand nombre de Marocains. Ces chrétiens marocains restent toutefois très prudents, car les peines peuvent être sévères et l'on sait les prisons marocaines peu confortables!
Eglise souterraine et Eglise « officielle »
Une autre visite nous dévoile un autre aspect de l'Eglise au Maroc. A Fès, nous participons à un culte dans l'Eglise évangélique au Maroc (EEAM). L'EEAM a des liens avec le gouvernement marocain et entretient des relations de confiance avec le Ministre des cultes. L'EEAM est une Eglise qui accueille les expatriés, les migrants et les étudiants subsahariens. Les cultes véhiculent une ambiance "africaine" avec de la louange et de la spontanéité. Cette Eglise répond aux besoins de toute une frange de population et, surtout, elle se rend visible dans le monde musulman. Le christianisme existe. Pour le président de l'EEAM, cette présence et cette possibilité de proclamer une Bonne Nouvelle sont importantes.
L'EEAM n'a pratiquement pas de Marocains en son sein. Une loi votée durant le protectorat interdit en effet aux chrétiens d'entrer dans une mosquée, et cette loi a son pendant : les musulmans n'ont pas le droit d'entrer dans une église.
Ainsi, le Maroc nous dévoile une Eglise à 2 faces : une face invisible et une face visible... Et toutes ces Eglises servent le Dieu de Jésus-Christ avec zèle et joie. Malheureusement, une certaine méfiance des uns à l'égard des autres, et vice-versa, nous fait dire que le Royaume a encore de la peine à s'installer dans notre monde. Un autre sujet de tristesse, c’est de voir, à Casablanca principalement, la « compétition » entre ces différentes missions des Eglises évangéliques... Toutefois on sais qu’il existe un mouvement de recherche d’unité « Viens, Saint-Esprit, anime tes fidèles d'un amour pur. » « Et le monde saura que nous sommes chrétiens par l'amour dont nos actes sont empreints » (chant).
R. et J.