Aumôniers d’entreprise : naissance d’une association et d’une formation en Suisse romande

Yves Jaques et Samuel Ribagnac
Yves Jaques et Samuel Ribagnac
vendredi 14 mars 2014

A l'initiative notamment de deux pionniers évangéliques de la branche, l'aumônerie d'entreprise s'organise en Suisse romande. Une première formation intervient en mai prochain.

Ils n'ont pas de bureau et travaillent en nomade avec un bloc-notes et leur natel. Samuel Ribagnac et Yves Jaques exercent l'activité pionnière en Suisse romande d'aumônier d'entreprise, respectivement pour les groupes Aligro et Boas. Convaincus de la pertinence de leur activité, ils ont fondé l'année dernière l'association Swiss Workplace Chaplains et finissent de mettre sur pied une première formation qui se déroulera du 19 au 22 mai prochain avec leur collègue alémanique Daniel Zwahlen1. Au menu des quatre jours de cours : le travail d'écoute et le b.a-ba de la relation d'aide. « Après une présentation de l'association et de sa vision, des questions d'ordre général seront abordées, relatives au contact avec les chefs d'entreprise, les cadres et le personnel, ainsi qu'avec les services spécialisés extérieurs vers lesquels orienter au besoin les collaborateurs, spécifie Samuel Ribagnac. Puis nous traiterons de défis plus spécifiques comme la maladie longue durée, l'absentéisme, le décès ou le mariage. Nous présenterons ensuite le partenariat que nous désirons vivre entre l'association et les aumôniers en termes de soutien et de partage des ressources. »
Comment l'activité de ces aumôniers d'entreprise est-elle pour l'heure perçue du côté des employés ? « C'est quelque chose en plus si jamais il m'arrivait quelque chose, lance Claudio, 10 ans d'entreprise, qui refait ce matin-là le 'lay-out' de la disposition des verres dans les rayons du marché Aligro à Chavannes (VD). Pour les Ressources humaines (RH), on est des numéros ; Samuel Ribagnac, il est sympa, il s'intéresse à nous. » A ses côtés, son collègue, Sivapalan, dans le groupe depuis 23 ans, ne comprend pas tout de suite de qui il s'agit, puis réagit : « Le pasteur ? Oui, on l'appelle comme ça, nous. Oui, il est bien ! »

Entre palettes et cafétéria
Samuel Ribagnac travaille depuis 8 ans comme aumônier d'entreprise pour Aligro. «Jean-Claude Chabloz, aumônier au Palais Fédéral à ce moment-là, nous a aidés à élaborer le profil du poste, explique-t-il. Au début, la direction a dû convaincre les cadres qui avaient peur que j'empêche les gens de travailler. J'ai cinq minutes avec chaque employé sur leur lieu d'activité, entre les palettes ou à la cafétéria ; puis je fixe au besoin un rendez-vous pendant leurs quinze minutes de pause ou après le travail. » Engagé à 80%, il consacre un jour dans chacun des quatre marchés romands du groupe et voit près de 600 personnes chaque semaine.
Employé par Boas, Yves Jaques visite lui plus de 1000 employés dans les différents Etablissements médico-sociaux (EMS) et hôtels que compte le groupe. « J'ai le titre d'accompagnant et suis engagé à 60% depuis l'été 2011. Cela signifie que je vois chaque personne une fois par mois. »
Les deux sont chrétiens et au bénéfice d'une formation pastorale. Pas de prosélytisme pour autant, assurent-ils. « Je suis un complément au travail des RH (ressources humaines), à la vie d'un EMS ou d'un hôtel ; une personne ressource », définit Yves Jaques, qui affectionne le mot de vis-à-vis pour décrire sa fonction. « On n'est pas dans la hiérarchie et on n'a aucune autorité : on peut accueillir la personne et la suivre dans ce qu'elle vit, que ce soit au niveau professionnel ou personnel. »
La profession est dans l'air du temps. Plusieurs patrons engagent actuellement des psychologues d'entreprise, comme en France, où ils souhaitent prévenir les risques « psychosociologiques ».

Demandes multiples
« Les demandes sont multiples », témoigne Samuel Ribagnac qui mentionne être allé par exemple à l'hôpital trouver un employé au chevet de son enfant atteint de septicémie ; ou avoir aidé une personne dans des démarches de formation continue et établi des budgets familiaux. « Ma prière quand je me lève est d'être en bénédiction pour un maximum de personnes et que l'amour de Dieu puisse me traverser et atteindre les autres, résume-t-il. C'est ce qui me pousse à prendre le train le matin. »
L'association Swiss Workplace Chaplains est basée sur les principes chrétiens tout en respectant les autres croyances, peut-on lire dans ses statuts. Cela signifie qu'elle s'adresse à des chrétiens et que la formation qu'elle dispense par conséquent aussi. Le contact avec des employés d'autres traditions religieuses ? « La question spirituelle vient seulement si la personne l'aborde », estime Samuel Ribagnac, qui propose néanmoins la prière suivant la situation. « Avec une employée musulmane, j'évoque le Dieu créateur, c'est notre plateforme commune », illustre pour sa part Yves Jaques.
Gabrielle Desarzens

(1) Les trois Suisses se sont inspirés du modèle américain Marketplace chaplain qui est une grosse société d'aumônerie d'entreprise aux Etats-Unis. « C'est presque une œuvre d'évangélisation en Amérique, mais nous avons écarté ce volet qui nous semblait ne pas correspondre à la culture helvétique », commente Samuel Ribagnac.

  • Encadré 1:

    « Aider » les gens, non pas les « évangéliser »
    Yves Jaques travaille au sein du groupe Boas depuis l'été 2011 à hauteur de 60%. Bernard Russi, directeur du groupe, répond à trois questions.

    Pourquoi avez-vous choisi le terme d'accompagnant et non d'aumônier pour le poste d'Yves Jaques ?
    - Le groupe BOAS que mon épouse et moi-même avons fondé il y a plus de 20 ans repose sur des valeurs chrétiennes. Cependant, nous tenons à respecter la liberté de chacun de nos collaborateurs. Le terme d'accompagnant nous semblait dès lors plus adéquat d'autant plus que notre objectif premier est d'aider les gens et non pas de les évangéliser.

    Pourquoi avoir introduit un tel poste au sein de votre groupe ?
    - L'idée m'a été suggérée par l'un de mes amis, Jean-Daniel André. Il est certain qu'avec l'expansion de notre groupe et le nombre toujours croissant de collaborateurs (980 en 2012, 1'450 d'ici la fin de cette année et 1'600 d'ici 2015), un tel service devenait nécessaire, à l'instar de ce qui a été mis en place depuis longtemps par les frères Demaurex des marchés Aligro.

    Comment évaluez-vous le bénéfice de son travail ?
    - Yves Jaques exerce de manière complètement autonome ; il n'a absolument aucun compte à nous rendre. Nous obtenons toutefois régulièrement des échos inhérents à la perception des collaborateurs via les directeurs des sites. Ainsi, nous savons que ses services sont extrêmement appréciés par ceux qui œuvrent dans nos différents EMS. Peu de retours en revanche émanent du côté de l'hôtellerie. Il est vrai que les horaires particuliers de ce secteur d'activité rendent la chose plus difficile à quantifier.

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