Quelques nouvelles alors que la situation est grave (mais on espère toujours qu'elle s'améliorera!). Cette nuit, nous n'avons pas pu fermer l'oeil. Depuis 3 heures du matin, nous étions sur le balcon ou devant la télévision pour suivre les événements. En ce moment, alors qu’il est 14 h, le 14 juillet (les festivités du 14 juillet pour les Français ont été annulées), nous n'avons plus d'électricité et cela depuis 7 h ce matin. J'entends les avions israéliens au-dessus de ma tête, mais je ne sais pas où ils viennent de lâcher des obus. Il faudra que je me procure une radio qui marche avec des piles!
Les supermarchés sont pris d'assaut et l'essence se fait rare ainsi que le pain...
En visite à l’école
Ce matin, je suis descendue avec Nayla dans la quartier de l'école puisque ce sont dans ces quartiers et dans toute la région des banlieues sud de Beyrouth que les frappes israéliennes ont eu lieu. Le pont sous lequel je passe quotidiennement est à terre en son milieu (cf. photo). C'est impressionnant. D'autres carrefours ont été touchés. Les routes étaient pratiquement vides et la circulation très aisée!! J'ai pu remplir ma voiture d'essence, alors que hier aucune station ne donnait plus rien.
Les gens du quartier étaient étonnés de nous voir. Beaucoup ont déjà fui vers des écoles qui ont ouvert leur porte pour recevoir des réfugiés. D'autres, comme notre propriétaire, une dame âgée, m'a dit en nous offrant de la pastèque, qu'elle préférait mourir chez elle plutôt que vivre en mendiante sur un matelas dans une école... Je la comprends, mais les gens de ce quartier sont très proches de l'aéroport et le bruit des bombes est très effrayant.
Nous sommes allées rendre visite à Zeina, notre employée au dispensaire. Ils étaient 11 dans deux pièces minuscules et on a bu du thé, tout en se demandant ce qui allait se passer. Ils n'ont nulle part où fuir et ont aussi décidé de rester aussi longtemps que possible.
Nayla a voulu dormir avec moi cette nuit et, à chaque bombe, elle se serrait contre moi. Je n'ai pas encore son visa, mais, de toute façon, aucune possibilité ni de sortir ni d'entrer au Liban. Paul Sanders qui devait aller à une conférence en Afrique du Sud a dû annuler. Les réserves de carburant de l'aéroport brûlent depuis minuit hier soir. Les buts de ces raids sont clairs. Mais c'est une catastrophe économique et touristique pour le Liban et des millions de perte par jour sans compter les millions de dégâts.
Les titres de « L’Orient le Jour »
Voici les grands titres de « L'Orient le Jour », le quotidien du Moyen-Orient en langue française, ce 14 juillet :
- Aéroport bombardé, 18 ponts détruits, port de Beyrouth fermé
- Israël impose au Liban un blocus total
- 12’000 touristes arabes ont passé la frontière syrienne (et les ambassades d'Arabie Saoudite et des Emirats Arabes ont affrété des bus spéciaux pour rapatrier leurs ressortissants via la Syrie. Mais depuis ce matin, c'est très difficile, car les ponts de la route de Damas ont été bombardés rendant la fuite par Damas difficile!)
- Les hôtels se vident à Beyrouth et se remplissent... à Damas
- Pris de panique, les Libanais se ruent sur les supermarchés, les stations d’essence et les boulangeries
- Annulations, départs précipités... Le tourisme touché en plein coeur
On fuit la solitude quand ça bombarde !
Je reprends ce message à 19 h et il n'y a toujours pas d'électricité. Des obus sont tombés sur Beyrouth il y a une heure. J'ai vu cela dans un magasin qui avait mis la télévision!!
Le voyage Beyrouth-Damas coûte 100 $ maintenant (10 $ il y a 3 jours!). Beaucoup d'étrangers fuient ainsi et vont prendre l'avion à Damas.
Il faut que j'arrête mon message, car la batterie de mon ordinateur (c’est un modèle chinois, elle se vide vite) ne va plus tenir longtemps.
Le positif dans tout cela, c'est que les gens se parlent et se visitent beaucoup. On n'a pas envie de rester seuls quand ça bombarde!
Catherine Mourtada