Chronique libanaise du 14 juillet : « Sauve qui peut! »

vendredi 21 juillet 2006
Catherine Mourtada vit depuis une quinzaine d'années à Beyrouth au Liban. Avec l'association Tahaddi, elle anime une école dans un bidonville de Beyrouth pour des enfants analphabètes. Elle visite aussi les prisons libanaises. Pour l'instant Catherine Mourtada a décidé de rester au Liban avec sa fille Nayla. Cette Suissesse compte parmi les envoyés du Trait d'union missionnaire (TUM) de l'Union des AESR. Voici sa chronique du 14 juillet.

Quelques nouvelles alors que la situation est grave (mais on espère toujours qu'elle s'améliorera!). Cette nuit, nous n'avons pas pu fermer l'oeil. Depuis 3 heures du matin, nous étions sur le balcon ou devant la télévision pour suivre les événements. En ce moment, alors qu’il est 14 h, le 14 juillet (les festivités du 14 juillet pour les Français ont été annulées), nous n'avons plus d'électricité et cela depuis 7 h ce matin. J'entends les avions israéliens au-dessus de ma tête, mais je ne sais pas où ils viennent de lâcher des obus. Il faudra que je me procure une radio qui marche avec des piles!
Les supermarchés sont pris d'assaut et l'essence se fait rare ainsi que le pain...

En visite à l’école
Ce matin, je suis descendue avec Nayla dans la quartier de l'école puisque ce sont dans ces quartiers et dans toute la région des banlieues sud de Beyrouth que les frappes israéliennes ont eu lieu. Le pont sous lequel je passe quotidiennement est à terre en son milieu (cf. photo). C'est impressionnant. D'autres carrefours ont été touchés. Les routes étaient pratiquement vides et la circulation très aisée!! J'ai pu remplir ma voiture d'essence, alors que hier aucune station ne donnait plus rien.
Les gens du quartier étaient étonnés de nous voir. Beaucoup ont déjà fui vers des écoles qui ont ouvert leur porte pour recevoir des réfugiés. D'autres, comme notre propriétaire, une dame âgée, m'a dit en nous offrant de la pastèque, qu'elle préférait mourir chez elle plutôt que vivre en mendiante sur un matelas dans une école... Je la comprends, mais les gens de ce quartier sont très proches de l'aéroport et le bruit des bombes est très effrayant.
Nous sommes allées rendre visite à Zeina, notre employée au dispensaire. Ils étaient 11 dans deux pièces minuscules et on a bu du thé, tout en se demandant ce qui allait se passer. Ils n'ont nulle part où fuir et ont aussi décidé de rester aussi longtemps que possible.
Nayla a voulu dormir avec moi cette nuit et, à chaque bombe, elle se serrait contre moi. Je n'ai pas encore son visa, mais, de toute façon, aucune possibilité ni de sortir ni d'entrer au Liban. Paul Sanders qui devait aller à une conférence en Afrique du Sud a dû annuler. Les réserves de carburant de l'aéroport brûlent depuis minuit hier soir. Les buts de ces raids sont clairs. Mais c'est une catastrophe économique et touristique pour le Liban et des millions de perte par jour sans compter les millions de dégâts.

Les titres de « L’Orient le Jour »
Voici les grands titres de « L'Orient le Jour », le quotidien du Moyen-Orient en langue française, ce 14 juillet :

- Aéroport bombardé, 18 ponts détruits, port de Beyrouth fermé
- Israël impose au Liban un blocus total
- 12’000 touristes arabes ont passé la frontière syrienne (et les ambassades d'Arabie Saoudite et des Emirats Arabes ont affrété des bus spéciaux pour rapatrier leurs ressortissants via la Syrie. Mais depuis ce matin, c'est très difficile, car les ponts de la route de Damas ont été bombardés rendant la fuite par Damas difficile!)
- Les hôtels se vident à Beyrouth et se remplissent... à Damas
- Pris de panique, les Libanais se ruent sur les supermarchés, les stations d’essence et les boulangeries
- Annulations, départs précipités... Le tourisme touché en plein coeur

On fuit la solitude quand ça bombarde !
Je reprends ce message à 19 h et il n'y a toujours pas d'électricité. Des obus sont tombés sur Beyrouth il y a une heure. J'ai vu cela dans un magasin qui avait mis la télévision!!
Le voyage Beyrouth-Damas coûte 100 $ maintenant (10 $ il y a 3 jours!). Beaucoup d'étrangers fuient ainsi et vont prendre l'avion à Damas.
Il faut que j'arrête mon message, car la batterie de mon ordinateur (c’est un modèle chinois, elle se vide vite) ne va plus tenir longtemps.
Le positif dans tout cela, c'est que les gens se parlent et se visitent beaucoup. On n'a pas envie de rester seuls quand ça bombarde!

Catherine Mourtada

Publicité

Journal Vivre

Opinion

Opinion

Agenda

Événements suivants

myfreelife.ch

  • Pour les Terraz et les Félix, des choix porteurs de vie

    Ven 22 septembre 2023

    Abandonner la voiture et emménager dans une coopérative d’habitation ?... Deux couples de l’Eglise évangélique (FREE) de Meyrin ont fait ces choix qu’ils estiment porteurs de vie. « Le rythme plus lent du vélo a vraiment du sens pour moi », témoigne Thiéry Terraz, qui travaille pour l’antenne genevoise de Jeunesse en mission. « Je trouve dans le partage avec mes voisins ce que je veux vivre dans ma foi », lui fait écho Lorraine Félix, enseignante. Rencontres croisées. [Cet article a d'abord été publié dans Vivre (www.vivre.ch), le journal de la Fédération romande d'Eglises évangéliques.]

  • Vivian, une flamme d’espoir à Arusha

    Jeu 15 juin 2023

    Vivian symbolise l’espoir pour tous ceux que la vie malmène. Aujourd’hui, cette trentenaire tanzanienne collabore comme assistante de direction au siège de Compassion à Arusha, en Tanzanie. Mais son parcours de vie avait bien mal débuté… Nous avons rencontré Vivian au bureau suisse de l’ONG à Yverdon, lors de sa visite en mars dernier. Témoignage.

  • Une expérience tchadienne « qui ouvre les yeux »

    Ven 20 janvier 2023

    Elle a 19 ans, étudie la psychologie à l’Université de Lausanne, et vient de faire un mois de bénévolat auprès de jeunes de la rue à N’Djaména. Tamara Furter, de l’Eglise évangélique La Chapelle (FREE) au Brassus, a découvert que l’on peut être fort et joyeux dans la précarité.

  • « Oui, la relève de l’Eglise passe par les femmes »

    Ven 16 septembre 2022

    Nel Berner, 52 ans, est dans la dernière ligne droite de ses études en théologie à la HET-PRO. Pour elle, la Bible est favorable au ministère féminin. Et les communautés doivent reconnaître avoir besoin tant d’hommes que de femmes à leur tête.

eglisesfree.ch

Suivez-nous sur les réseaux sociaux !