« C’est comme si c’était fait ». C’est par ces mots que l’agriculteur et député UDC au Grand Conseil vaudois Jean-Luc Chollet résume l’avancée de la demande de reconnaissance d’intérêt public déposée par les évangéliques en mars 2007. Un excès d’optimisme pour un dossier en souffrance depuis 4 ans ? « J’en ai parlé récemment avec le conseiller d’Etat Philippe Leuba qui m’a indiqué qu’il restait encore un règlement d’application à rédiger. De facto, la demande est acceptée, même si formellement ce n’est pas encore le cas », assure-t-il.
« Nous travaillons sur un règlement d’application de la loi qui a été modifiée, lui fait écho au Château à Lausanne Eric Golaz, chef du SeCri, le Service des communes et des relations institutionnelles. Une fois le règlement adopté par le Conseil d’Etat, les demandes seront examinées. » Aux côtés de celle de la Fédération évangélique vaudoise (FEV) qui compte 53 Eglises locales, deux autres demandes sont actuellement en attente : l’une de l’Eglise anglicane et l’autre de l’Eglise catholique chrétienne.
L’Eglise réformée et l’Eglise catholique ont été reconnues de droit public dans la Constitution vaudoise de 2002 (article 170) et la communauté juive comme institution d’intérêt public (art. 171).
Devenir partenaire
Si les évangéliques désirent contribuer de manière plus officielle au lien social et à la transmission de valeurs fondamentales, l’intérêt de cette reconnaissance pour eux est d’être enfin perçus comme partenaire dans le débat public, explique Stéphane Bossel, responsable du Service communication et administration de la FREE, qui a suivi ce dossier de près. Il s’agit aussi d’avoir une meilleure visibilité : « Etre reconnu d’intérêt public signifie ne plus être perçu comme une secte », précise-t-il.
Mais comment expliquer le retard pris par le dossier ? La Loi vaudoise sur la reconnaissance des communautés religieuses (LRCR), adoptée en janvier 2007, ne comprenait pas d’article quant à la procédure à suivre en cas de refus d’une telle demande, explique Eric Golaz. Il a fallu modifier, puis faire adopter la modification de la loi au Grand Conseil. Ensuite reprendre le travail au niveau du règlement d’application. « Les demandes devraient maintenant être examinées cet automne », assure le chef de service, qui dépend directement du Département de l’intérieur de Philippe Leuba. « Cela bloque au niveau politique et administratif, car l’acceptation de cette demande amène dans la foulée un débat sur la laïcité et un autre sur l’islam », estime cependant Stéphane Bossel.
Intérêt des musulmans
Si une demande de reconnaissance d’intérêt public n’a pas encore été déposée formellement par les musulmans, cela ne saurait d’ailleurs tarder : les délégués de l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM) réunis en avril dernier lors de leur assemblée générale ont indiqué vouloir améliorer la visibilité des musulmans, faire connaître leurs besoins, et promouvoir leur intégration et leur reconnaissance sociale. Selon Pascal Gemperli, vice-président de l’UVAM, beaucoup de Suisses sont musulmans, et l'islam est une religion suisse qui n'est pas reconnue du point de vue formel, mais qui est une réalité du point de vue sociétal. Résultat : l'UVAM, qui fédère une quinzaine de membres et près de 80% des lieux de culte – à l'exception notable de la Mosquée de Lausanne – aurait pour objectif d'entamer très rapidement les démarches pour être reconnue par l'Etat de Vaud comme institution d'intérêt public.
Gabrielle Desarzens
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