Pour Illia Djadi, les radios évangéliques d’Afrique francophone doivent promouvoir le vivre ensemble pacifique entre communautés

Illia Djadi de Portes ouvertes et Emmanuel Ziehli de Radio Réveil
Illia Djadi de Portes ouvertes et Emmanuel Ziehli de Radio Réveil
Serge Carrel vendredi 02 octobre 2020

Actif avec Portes ouvertes dans la défense de la liberté religieuse en Afrique, Illia Djadi était en Suisse romande cette semaine pour préparer la troisième rencontre de journalistes et d’animateurs radio qui se tiendra à Lomé du 23 au 27 novembre sous l’égide de Radio Réveil à Bevaix (CH). Ce journaliste, autrefois à la BBC, dévoile ici quelques éléments de son intervention : l’importance de promouvoir le vivre ensemble pacifique entre communautés ethniques et religieuses. Rencontre.

 

 

Illia Djadi, vous allez plaider à Lomé 3 l’importance de développer dans les radios évangéliques d’Afrique francophone des programmes qui abordent le vivre ensemble. Pourquoi ?

C'est un thème d'actualité qui s'impose aujourd’hui au regard de la situation que vivent tous les pays de la sous-région. Que l’on soit au Niger, au Mali, au Burkina Faso ou ailleurs, le vivre ensemble est aujourd’hui menacé.

Notamment à cause de l'émergence de mouvements djihadistes…

Oui. Des mouvements djihadistes sont actifs dans toute cette partie du sud du Sahara. Ils menacent l'existence même de pays comme le Mali, le Burkina et le Niger. Ces groupes armés tentent de diviser les communautés sur des bases ethniques ou religieuses. Pendant des centaines d’années, ces communautés religieuses ont appris à vivre ensemble, malgré  des conflits localisés.

Comment les Eglises peuvent-elles être des acteurs pour lutter contre cette dynamique d'islamisation à laquelle on assiste en Afrique francophone ?

En Afrique francophone, les Eglises et les radios proches de celles-ci sont des acteurs majeurs de la scène sociale. Les Eglises participent à l'éducation des enfants et des jeunes ; elles s’impliquent dans des projets sociaux de développement et de construction, ainsi que dans des centres de santé. Aujourd’hui, on se rend compte que l'existence de ces Eglises est menacée, parce que les chrétiens eux-mêmes sont menacés. D’où la responsabilité des Eglises de prendre position en tant qu'acteur social pour qu’il se passe quelque chose.

Concrètement, quel rôle les radios évangéliques peuvent-elles jouer ?

Vu l’importance du média radio en Afrique, la production d’émissions qui sensibilisent au vivre ensemble et à la cohésion sociale est fondamentale.

Avez-vous des exemples où le média radio a joué un rôle important pour promouvoir une culture de la tolérance entre communautés ?

Au Niger, mon pays d’origine, à la suite des événements de Charlie Hebdo à Paris en janvier 2015, une centaine d'églises et de bâtiments appartenant à des chrétiens ont été saccagés et détruits. A la suite de cet événement, on a assisté à un réveil des consciences, au point que l’on pouvait voir sur un même plateau de radio ou de télévision les principaux leaders des communautés religieuses, notamment protestants, catholiques et musulmans.

De par le simple fait de se retrouver ensemble, ils ont posé un symbole fort à l'endroit de l'ensemble de la population. Ils ont pu dire ainsi : « On est soudés. Ce qui s'est passé constitue un incident malheureux et isolé. Ce n'est pas représentatif de l'islam. Les musulmans dans leur majorité ne se reconnaissent pas à travers ces exactions. D'une même voix, nous rejetons et condamnons ce qui s'est passé ! »

D'autres exemples à mentionner où la radio a contribué à apaiser une situation ?

Au Burkina Faso grâce aux radios qui diffusent des émissions dans toutes les langues locales, il est possible d’envoyer des messages aux différentes communautés, qu'elles soient mossies ou peules, pour attirer leur attention sur le danger qui guette ce pays connu pour sa culture de la tolérance.

Pratiquement, une radio chrétienne peut inviter de temps à autre un imam dans son studio. C'est déjà un symbole fort de l'acceptation de l'autre et de l’acceptation de sa différence. Il faut aussi un enseignement théologique pour que les chrétiens sur place comprennent que la persécution fait partie intégrante de la vie chrétienne…

Mais n’est-ce pas déjà battre en retraite face à l'émergence de ces mouvements violents ?

Non, c'est d’abord une prise de conscience, afin de bien réagir dans un tel contexte. La persécution peut prendre plusieurs formes. Aujourd'hui, on se rend compte qu'elle naît suite à cet intégrisme islamique et à ces attaques perpétrées par des groupes extrémistes.

Dans un tel contexte, la politique de l'autruche, qui consiste à mettre sa tête dans le sable, ne suffit pas. Il faut proposer un contre-discours basé sur l’amour que le Christ nous invite à témoigner à notre prochain, y compris à notre ennemi. Un tel contre-discours est à même de contrecarrer les discours de haine tenus par les islamistes, parce que les gens sont sensibles aux gestes d'amour, aux actes d'amour et aux discours qui promeuvent la tolérance.

Il faut donc réaliser des émissions qui, comme la conférence de Lomé 2 l’a mis en avant en 2019, développent un propos holistique, un propos qui prenne en compte les réalités et les défis qui se posent à la société et aux Eglises aujourd’hui, et qui y répond.

Propos recueillis par Serge Carrel

Publicité

Twitter - Actu évangélique

Journal Vivre

Opinion

Opinion

TheoTV (mercredi 20h)

20 janvier

  • «La terre, mon amie» avec Roger Zürcher (Ciel! Mon info)
  • «Repenser la politique» avec Nicolas Suter (One’Talk)

27 janvier

  • «La méditation contemplative» avec Jane Maire
  • «Vivre en solobataire» avec Sylvette Huguenin (One’Talk)

TheoTV en direct

myfreelife.ch

  • « J’ai été un bébé volé du Sri Lanka »

    Ven 03 novembre 2023

    Il y a quelques années, un trafic d’enfants proposés à l’adoption à des couples suisses secouait l’actualité. Sélina Imhoff, 38 ans, pasteure dans l’Eglise évangélique (FREE) de Meyrin, en a été victime. Elle témoigne avoir appris à accepter et à avancer, avec ses fissures, par la foi. Et se sentir proche du Christ né, comme elle, dans des conditions indignes. [Cet article a d'abord été publié dans Vivre (www.vivre.ch), le journal de la Fédération romande d'Eglises évangéliques.]

  • Des choix porteurs de vie

    Ven 22 septembre 2023

    Abandonner la voiture et emménager dans une coopérative d’habitation ?... Deux couples de l’Eglise évangélique (FREE) de Meyrin ont fait ces choix qu’ils estiment porteurs de vie. « Le rythme plus lent du vélo a vraiment du sens pour moi », témoigne Thiéry Terraz, qui travaille pour l’antenne genevoise de Jeunesse en mission. « Je trouve dans le partage avec mes voisins ce que je veux vivre dans ma foi », lui fait écho Lorraine Félix, enseignante. Rencontres croisées. [Cet article a d'abord été publié dans Vivre (www.vivre.ch), le journal de la Fédération romande d'Eglises évangéliques.]

  • Vivian, une flamme d’espoir à Arusha

    Jeu 15 juin 2023

    Vivian symbolise l’espoir pour tous ceux que la vie malmène. Aujourd’hui, cette trentenaire tanzanienne collabore comme assistante de direction au siège de Compassion à Arusha, en Tanzanie. Mais son parcours de vie avait bien mal débuté… Nous avons rencontré Vivian au bureau suisse de l’ONG à Yverdon, lors de sa visite en mars dernier. Témoignage.

  • Une expérience tchadienne « qui ouvre les yeux »

    Ven 20 janvier 2023

    Elle a 19 ans, étudie la psychologie à l’Université de Lausanne, et vient de faire un mois de bénévolat auprès de jeunes de la rue à N’Djaména. Tamara Furter, de l’Eglise évangélique La Chapelle (FREE) au Brassus, a découvert que l’on peut être fort et joyeux dans la précarité.

eglisesfree.ch

  • Un·e responsable des finances (10%)

    Lun 29 janvier 2024

    Plus grande fédération d’Eglises évangéliques en Suisse romande, la FREE offre un cadre de travail dynamique et défiant, en lien étroit avec les autres acteurs du milieu chrétien évangélique romand, suisse et international. Dans ce cadre, la FREE recherche un·e responsable des finances.

  • Rencontre générale : une fédération utile

    Mer 29 novembre 2023

    La Rencontre générale du 25 novembre 2023 a permis de remercier Stéphane Bossel pour 23 ans d’engagements divers et importants dans la FREE. Elle a aussi permis à l’équipe de direction de partager quelques priorités, notamment le sens, les valeurs et la plus-value que la FREE peut offrir aux Eglises.

  • Rencontre générale de la FREE : l’équipe de direction souffle sa première bougie

    Sam 08 avril 2023

    La Rencontre générale de la FREE, qui a eu lieu le 1er avril 2023 à Aigle, a permis à la nouvelle équipe de direction de dresser un bilan, après tout juste une année de fonctionnement. Et ce qui saute aux yeux, c’est le grand nombre des défis à relever.

  • FREE : une première « Journée stratégique »

    Ven 03 février 2023

    Les personnes qui exercent un rôle dans la FREE se sont réunies en janvier pour réfléchir à la mise en œuvre de la nouvelle « gouvernance à autorité distribuée » (1). Retour sur une « Journée stratégique » conviviale et studieuse.

eglise-numerique.org

point-theo.com

Suivez-nous sur les réseaux sociaux !