PerspectivePlus, l'entreprise qui remet des jeunes en piste

lundi 24 mars 2014

L'entreprise PerspectivePlus, à Thielle-Wavre près de Neuchâtel, vient en aide à des jeunes qui n'arrivent pas à devenir indépendants et à s'insérer dans le monde du travail. Visite guidée.

Selon une étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en Suisse, plus d'un jeune sur six souffre de problèmes psychiques. L'Assurance invalidité (AI) admet 1300 jeunes chaque année pour cette raison. A La Chaux-de-Fonds et dans le Val-de-Travers, le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans frôle les 10%. A Bienne, un jeune sur cinq vit de l'aide sociale. Le Conseiller d'Etat socialiste vaudois Pierre-Yves Maillard s'alarme en constatant que, pour beaucoup de jeunes, vivre de l'aide sociale est devenu un objectif de vie.
A Thielle-Wavre, près de Neuchâtel, l'entreprise PerspectivePlus existe depuis l'été 2013. Elle vient en aide à des jeunes en difficulté. Son directeur, Bernard Frei, constate : « Il existe un gros problème avec les jeunes. Parmi eux, beaucoup ont de grandes difficultés à passer de l'école à la vie active. Et nous constatons que l'octroi de rentes AI est en recul, sauf chez les jeunes. » Bernard Frei parle d'expérience, lui qui a travaillé à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) à Berne.

PerspectivePlus, à point nommé
PerspectivePlus n'est pas une institution, mais une association laïque, ainsi qu'une entreprise donnant des perspectives d'intégration à des jeunes en difficulté. Elle comprend plusieurs secteurs : entretien d'espaces verts, horticulture, maraîchage, impression de documents, fiduciaire... Parmi ses clients, on compte un hôtel et plusieurs propriétaires d'immeubles qui lui confient l'entretien du jardin, une propriété par étages et un hôtel qui se déchargent de tâches de gestion et d'administration. Selon son business plan, PerspectivePlus devrait atteindre l'équilibre financier au début de l'été 2014.
Actuellement, dix jeunes travaillent à PerspectivePlus, encadrés par onze salariés, généralement à temps partiel. Mais l'entreprise possède une capacité d'accueil de vingt jeunes.
Ceux-ci sont envoyés par l'AI et, bientôt, par l'assurance chômage. Ils n'ont pas trouvé de place d'apprentissage et se retrouvent en situation d'échec et de découragement. Ils souffrent souvent de problèmes psychologiques, de manque de concentration. Ils ont perdu l'habitude de se lever le matin, d'aller au travail et d'y rester huit heures par jour, de tenir leurs engagements. Certains vivent seuls depuis plusieurs années, presque sans contacts avec d'autres personnes. Pour eux, le passage à l'âge adulte et à l'indépendance constitue une montagne infranchissable... du moins sans aide. Cassés par les échecs, ils ont un énorme besoin de reconnaissance.

Equipés pour devenir indépendants
A la sortie de leur séjour à PerspectivePlus, les jeunes devraient avoir commencé une formation et être capables de la terminer dans une entreprise. « Nous avons absolument besoin que des entreprises jouent le jeu, nous aident et donnent une place aux jeunes, précise Bernard Frei. C'est le secret de la réussite. »
PerspectivePlus est une association laïque, mais son action est basée sur des valeurs chrétiennes, qui donnent un cadre éthique à cet engagement social et commercial. La direction de l'entreprise est assurée conjointement par Bernard Frei et par Mathias Reich, un membre de la Communauté protestante Don Camillo. Cette proximité de l'entreprise avec cette communauté située à Montmirail suscite parfois la question de la dimension religieuse de l'association. « Nous devons alors expliquer que PerspectivePlus ne fait pas de prosélytisme chrétien, mais que son action est purement diaconale, c'est-à-dire au service de l'humain », relève Bernard Frei.
Claude-Alain Baehler

  • Encadré 1:

    Bernard Frei : mon CEO1, c'est Dieu !
    Bernard Frei, 57 ans, marié et père de trois enfants adultes, est membre de l'Eglise évangélique l'Abri (FREE) à la Neuveville. Cet économiste aime les défis. Il y a 30 ans, il a créé des ateliers protégés pour handicapés psychiques. Il y a 20 ans, il a fondé une fiduciaire destinée à lancer des jeunes sans emploi. « Mais rien n'est jamais gagné d'avance, précise-t-il. Chaque fois, on recommence à zéro. »
    En 2010, Bernard Frei prend un congé sabbatique et part pour la Norvège. Là, il effectue un pèlerinage, le Saint Olav's Way, réfléchit à ce qu'il va faire sur le plan professionnel d'ici sa retraite... et décide de s'impliquer plus directement dans un travail auprès des jeunes.
    Un an plus tard, Bernard Frei travaille comme consultant auprès de la Communauté chrétienne Don Camillo de Montmirail, à Thielle-Wavre. Il aide au développement d'un projet permettant à des jeunes d'entamer une formation professionnelle. Mais les attentes du groupe qui veille sur l'association évoluent et le consultant est appelé à devenir co-directeur de ce projet. En 2012, il quitte son travail à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et s'engage dans ce nouveau défi.
    « A un moment, j'ai dit à Dieu que je lui rendais ce projet, se souvient Bernard Frei. Mais j'ai ajouté qu'il pouvait me le redonner à son tour s'il le désirait. Ensuite, j'ai compris que cette association appartenait à Dieu... qui me demandait simplement d'y travailler. Ainsi, mon CEO, c'est Dieu. » Ce changement de perspective a permis à Bernard Frei d'expérimenter une forme de sérénité dans son travail, ainsi que quelques exaucements fantastiques.
    Aujourd'hui, le projet de formation de jeunes de la Communauté Don Camillo a laissé la place à PerspectivePlus, une association laïque et une entreprise dont le but est la réinsertion de jeunes en difficulté.

    1 Chief executive officer.

  • Encadré 2:

    Une bombe pour la société
    L'incapacité de beaucoup de jeunes à passer de l'école à l'autonomie et à la vie professionnelle est un problème qui ne concerne pas que la Suisse. Tous les pays occidentaux sont touchés.
    Les raisons de cette évolution ne sont pas bien connues. Certains évoquent la déstructuration de la famille et la complexification de la société qui fragiliserait les jeunes. « Notre société a également perdu beaucoup de rites de passage tels que l'apprentissage et l'armée, précise Bernard Frei. Ceux-ci structuraient les âges de la vie et les rôles de chacun dans la société. Et puis, notre société dans laquelle le zapping est roi incite les jeunes à surfer tous azimuts au détriment du travail à long terme, de la poursuite d'objectifs et de la capacité à se concentrer sur un but. »
    Actuellement, les autorités commencent à prendre la mesure du problème et des coûts sociaux que cela engendrera. Chaque canton suisse répond à sa manière. A Neuchâtel, il a été décidé de réduire l'aide sociale aux jeunes et de réinvestir l'argent dans des processus d'accompagnement.
    « J'ai réalisé l'ampleur du problème lorsque je travaillais à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), précise Bernard Frei. Et il s'agit d'une véritable bombe pour la société. Cela dit, j'aimerais interpeller les Eglises et leur demander d'être des lieux d'accueil, d'entraide et de formation pour les jeunes. Celles-ci sont équipées pour répondre à de nombreuses questions en matière d'éducation, de couple et de famille. »

  • Encadré 3:

    PerspectivePlus, avant tout une entreprise
    PerspectivePlus cherche des mandats commerciaux dans les domaines des services commerciaux (comptabilité financière, saisie d'écritures comptables, gestion de comptes débiteurs et créanciers, facturation, administration de banque de données) et de l'entretien d'espaces verts dans la région de Neuchâtel, La Neuveville, Plateau de Diesse (jardins privé, alentours d'industries ou d'écoles, immeubles locatifs...). PerspectivePlus répondra volontiers à vos questions et vous proposera une offre. Contact téléphonique : 032 753 59 01.

    Site: www.perspectiveplus.ch

  • Encadré 4:

    Grâce à la générosité d'un entrepreneur suisse allemand...
    PerspectivePlus loue une ancienne maison de maître dans le hameau de Closel Bourbon, à deux pas de Montmirail. Ce hameau a appartenu à un entrepreneur suisse allemand. Un jour, celui-ci a offert Closel Bourbon à la Communauté chrétienne Don Camillo : la maison de maître, la ferme et les dépendances.

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