« Nous vivons une mutation rapide de notre société, souligne Bernard Frei, membre du Bureau des rencontres générales (BRG) et responsable financier ad interim de la FREE. Et, quelque soient les scénarios envisagés, nous pouvons nous attendre à ce que ces changement exigent plus de solidarité, ainsi qu’une plus grande capacité à partager nos biens et nos ressources. » Et, pour Bernard Frei, les Églises sont placées devant un choix : accompagner le changement en développant leur solidarité, ou laisser d’autres organisations faire cela, au risque de se marginaliser.
Le membre du BRG mentionne quatre changements sociétaux qui impactent directement notre société, ainsi que nos Églises :
• l’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) chamboule le monde professionnel et privé. Des personnes vont perdre leur emploi, alors que d’autres activités se développeront. Il existe le risque que de nombreux chômeurs aient besoin de soutien ;
• les flux migratoire vont s’intensifier à cause, d’une part, de la réorganisation géopolitique de notre monde – avec les conflits que cela engendre – et, d’autre part, du dérèglement climatique. Beaucoup d’habitants des pays du Sud devront s’exiler, et nous aurons à en accueillir une partie ;
• de nouvelles crises sanitaires, à l’image de celle du Covid, surviendront et nécessiteront de la solidarité ;
• les questions identitaires débattues dans notre société participent à la déstructuration des familles. Cela laisse de graves blessures dans jeune génération. Les chrétiens et les Église doivent proposer des modèles et des accompagnements permettant à ces jeunes de grandir plus sainement.
« Par le passé, les chrétiens se sont beaucoup engagés dans le domaine social, rappelle Bernard Frei. Puis l’État s’est largement substitué aux œuvres chrétiennes. Mais, avec 6 % d’augmentation annuelle des dépenses sociales, celui-ci peine de plus en plus à répondre à tous les besoins. Des acteurs privés, dont les Églises, vont devoir venir en aide. »
L’engagement social chrétien est un commandement
Pour Bernard Frei, le récit du tri entre les brebis et les boucs, lors du Jugement dernier (Mt 25.31-46), nous rappelle que l’engagement social n’est pas une option, mais un commandement : « Le Christ nous commande d’être généreux, d’aimer en actes et en vérité, parce que l’annonce de l’Évangile est toujours liée à de l’action sociale. Notre société a besoin de voir des actions qui montrent notre foi ».
Avec ce double éclairage de l’augmentation des défis sociaux et de la responsabilité sociale des chrétiens, le membre du BRG propose à nos Églises et à ses instances dirigeantes d’entrer dans une réflexion qui pourrait aboutir à la création d’une Commission sociale ou d'un groupe de réflexion dans la FREE. Le rôle de cette entité ne serait pas de se substituer aux engagements sociaux actuels des Églises de la FREE. Il ne s’agit pas non plus de réactiver la Commission sociale qui, il y a un quart de siècle, a existé au sein des anciennes « Assemblées évangéliques de Suisse romande ».
Le rôle de cette commission ou de ce groupe serait, par exemple, d’alimenter une réflexion à propos de l’évolution de notre société et de ses besoins, de proposer des outils de gestion du travail social et diaconal, d’accompagner les Églises dans leurs propres réflexions et dans leurs propres engagements sociaux, de veiller à une bonne articulation entre évangélisation et action sociale, de maintenir un lien avec les organismes sociaux de l’État.
« Notre rôle de fédération n’est pas de concurrencer l’engagement social de l’État, souligne Bernard Frei. Il serait plutôt de donner des réponses novatrices, originales et inspirées par notre foi, par la Bible et par l’amour de notre prochain, là où l’état ne peut pas agir. »