Actuellement, un habitant sur 20 en Suisse est musulman. D’ici dix ans, il est très probable que cette proportion soit de 1 sur 15 ou soit plus petite encore. Quelqu’un prétendant aimer son prochain ne pourra dès lors plus éviter la rencontre des musulmans. A mon avis, c’est déjà vrai maintenant ! Devant ce fait, nous assistons à deux types de réaction. L’une consiste à s’alarmer excessivement, sans vraiment connaître la nébuleuse musulmane et surtout des musulmans eux-mêmes, en chair et en os ; la conséquence est alors le repli dans une forteresse qui empêche l’intégration et le bon voisinage. L’autre réaction est celle d’un optimisme béat : tout va s’arranger, les religions sont des routes qui mènent toutes au même but, nos institutions démocratiques sont assez solides pour maîtriser les lobbies qui militent pour un islam politique en Suisse, etc.
Entre alarmisme excessif et optimisme béat, une troisième attitude
Le premier type de réponse a tout de l’attitude du bunker et n’engendre aucun futur à long terme. Le deuxième type est d’une naïveté qui se révélera rapidement dommageable. Il existe une troisième réaction qui émane en droite ligne de l’attitude et de l’enseignement de Jésus, le Serviteur messianique de Dieu, humble, mais établi et oint par Dieu comme Maître des nations et des puissances. Il s’agit de rencontrer les musulmans sans peur, sans arrogance et sans naïveté, mais en connaissance de cause et avec amour ; pas l’amour sentimental ou forcé qui est souvent le nôtre, mais l’amour du Christ que produit l’Esprit de Dieu, l’amour qui transcende les classifications. En tant qu’évangéliques, connaissez-vous une autre bonne réponse à donner à cette imprégnation progressive de l’Europe et de l’Afrique par l’islam ? « L’amour parfait bannit la crainte, dit saint Jean, et il n’y a pas de peur dans l’amour » (1 Jn 4.18). Or, beaucoup de nos compatriotes ont peur des musulmans, sans que cela soit très conscient. Mais rien de bon ne vient de la peur, en tout cas pas la vie et la paix. En outre, ceux qui ont peur ignorent certaines des richesses culturelles que véhiculent ces gens. Or, mon expérience de dix-huit années de rencontres de musulmans issus de différents arrière-plans m’a appris qu’aimer en action et en vérité est la seule force capable d’ouvrir le cœur et la mentalité, même parfois bétonnée, de nos voisins, voire compatriotes, musulmans.
Un amour qui peut passer par le partage de l’Evangile
En outre, l’amour bien compris pour ces prochains que sont les musulmans inclut en même temps la responsabilité de leur faire connaître la source de Vie dont nous avons bénéficié nous-mêmes… l’accès gratuit à la Famille du Père et au règne messianique, l’Evangile de Jésus-Christ. C’est peut-être là que le bât blesse, car deux siècles et demi d’intimidation idéologique d’un humanisme sans Dieu par notre culture européenne ont réduit les chrétiens à douter et, de plus en plus, à s’excuser quand il s’agit de partager l’Evangile à d’autres (ou même de prier pour le monde musulman, comme cela s’est vu récemment en Angleterre !). Mais il n’est pas possible de vouloir séparer l’action aimante et le message - source de cette action. Vouloir séparer ainsi revient à tronquer et à dénaturer tout à la fois l’amour et la vérité incarnée. Oui, la moisson est mûre pour la récolte, mais il y a peu d’ouvriers pour la rentrer !
Une conférence pour se former
C’est pour pallier ces carences ou ces déséquilibres que la Conférence « Impulsions 08 », du 31 octobre (soir) au 2 novembre, a été mise en place par un groupe de chrétiens engagés dans divers mouvements et églises en Suisse. Avec des orateurs reconnus pour leurs compétences et des témoins sur le terrain, les membres de nos églises pourront se former à l’approche des musulmans et surmonter les obstacles culturels, émotionnels et spirituels qui se dressent sur la route du témoignage. Nous ne saurions trop recommander aux pasteurs et aux responsables d’Eglise à un niveau quelconque de participer à ces rencontres, sans se dire que cette tâche incombe à quelques spécialistes qui ont un appel particulier. Non, cette question est devenue incontournable pour tout chrétien conscient des enjeux du temps présent.
Jean-Pierre Besse, pasteur et responsable de CABES
Site internet pour de plus amples renseignements.