Qui suis-je ?

Yohan Salsac vendredi 13 septembre 2024

Comment les croyants peuvent-ils se situer, dans une société post-chrétienne qui retourne au paganisme et au panthéisme ? Yohan Salsac, pasteur dans l’Église évangélique de Cossonay (FREE), nous suggère de nous concentrer sur l’adoration du Créateur. [Cet article a d'abord été publié dans Vivre (www.vivre.ch), le journal de la Fédération romande d'Eglises évangéliques.]

« Qui suis-je ? » Cette question est probablement l’une des plus anciennes que l’humanité s’est posée – et se pose encore ! D’illustres philosophes se sont penchés sur cette question, en prenant différents points de départ : la mythologie, le monde qui nous entoure ou l’être humain lui-même.

Pour nous chrétiens, la révélation de Dieu sera notre point de départ ; en effet, la Bible n’est pas silencieuse sur cette interrogation fondamentale. Dès ses premiers mots, elle nous dévoile une vérité fondamentale : Dieu a créé le ciel et la terre (Ge 1.1). Les premiers mots du Credo suivent le même schéma : « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre ». Ici, un sujet « je » confesse un Dieu omnipotent et créateur de l’univers.

Il y a donc un Dieu créateur et une création. Les deux sont distincts et ne doivent pas être confondus. Maintenir cette vérité nous évite, d’une part, l’écueil du paganisme et du panthéisme qui tentent de trouver le divin dans la création et, d’autre part, celui du matérialisme où l’univers n’existerait que par lui-même.

Retour du paganisme et du panthéisme

Alors que nous vivons la fin de la chrétienté, notre société d’Europe occidentale tend à retrouver le paganisme que le christianisme avait chassé. En faisant table rase de l’héritage chrétien, les Lumières ont asséché la pensée de toute notion religieuse. Cette page blanche laisse, au XXe siècle, nos contemporains redécouvrir une spiritualité sans Dieu, où le divin se ferait partie intégrante de la nature.

Si le monde n’existait que par lui-même, il n’aurait ainsi aucune finalité. A l’inverse, si le divin se confondait dans la nature, celui-ci serait sujet au changement, au fur et à mesure que celle-ci évoluerait. L’être humain participerait aussi à ce grand tout, que l’écologiste anglais James Lovelock appelle Gaïa, et perdrait donc de son individualité.

Qu’est-ce que ça change d’avoir un Dieu créateur, distinct de sa création ? Comme nous l’avons dit, la Bible nous propose une autre manière de voir. La création est l’œuvre d’un Dieu tout-puissant ; elle n’est ni sacrée, ni divine. Il l’a créée à partir de rien (ex-nihilo). Dieu est indépendant d’elle, et cela signifie qu’il ne change pas au fur et à mesure que le monde change. Il règne sur l’œuvre de ses mains et la soutient par sa providence, pour la mener à la finalité qu’il a définie pour elle.

La finalité de la création

Dieu a créé l’univers entier avec un but, celui de le glorifier. L’apôtre nous dit que Dieu a créé toutes choses par lui et pour lui (Col 1.16). Ainsi, la destinée de l’univers est liée à la personne et à l’œuvre de Jésus-Christ. En Christ, nous pouvons donc être confiant quant à notre avenir : l’être humain n’a pas tant besoin de dominer le monde que de se soumettre à Christ.

Le théologien Herman Bavinck définira l’œuvre de Dieu ainsi : « la création est le théâtre de la gloire de Dieu(1) ». Savez-vous le privilège que nous avons ? Dieu nous a placés là où nous sommes pour être actrices et acteurs dans ce théâtre. La question de départ était mal posée, je l’accorde. Il aurait été plus juste de dire : « Qui suis-je devant Dieu ? »

Alors, qui suis-je devant Dieu ? Nous n’avons pas à nous désespérer à propos de la finalité du monde, ni même à rechercher le divin dans ce qui est sujet au changement. Mais nous sommes simplement appelés à être des adoratrices et des adorateurs.

 

(1) Herman Bavinck, Reformed dogmatics. God and Creation, trad. John Vriend, vol. 2, Grand Rapids, Baker Academic, 2004, p. 406.

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