Bientôt retraité, le pasteur Norbert Valley dresse un bilan de ses démêlés avec la justice (avec une émission TV)

Serge Carrel mardi 26 mai 2020 icon-comments 2

Norbert Valley est définitivement acquitté. Le Parquet neuchâtelois a renoncé à faire recours contre l’acquittement dont le pasteur de la FREE a été l’objet le 12 mars dernier. L’occasion pour lafree.info de faire un bilan de près de deux ans de procédure judiciaire avec celui qui est devenu en Suisse l’emblème de la « criminalisation de la solidarité ». A lire ici et à voir dans l’émission « Ciel ! Mon info » de DieuTV

« Je vais prendre ma retraite en novembre prochain ! » Pendant ces deux dernières années, le pasteur Norbert Valley est devenu l’un des évangéliques les plus médiatisés de Suisse. Condamné par la justice neuchâteloise en août 2018 pour avoir donné à manger et hébergé un requérant d’asile débouté, il a finalement été libéré de toute charge. Le Parquet neuchâtelois a en effet décidé de ne pas faire appel de la décision du Tribunal des montagnes à La Chaux-de-Fonds, tombée le 12 mars dernier.

Libéré d’un poids !

« On est reconnaissant lorsqu’on est définitivement acquitté. La pression s’en va et cela fait du bien d’être libéré d’un poids qui a pesé durant deux ans sur ses épaules », confie celui qui va quitter fin octobre ses activités pastorales, partagées entre l’Eglise évangélique de l’Arc jurassien, qui se retrouve actuellement à La Chaux-de-Fonds, et le Centre FREE de Morat.

Emblème avec la Bâloise Anni Lanz de la « criminalisation de la solidarité » en Suisse, Norbert Valley ne va pas cesser, la retraite venue, toute activité en lien avec les requérants d’asile. Il envisage tout d’abord de continuer à soutenir son ami togolais débouté. « Il est toujours en mode survie dans ce pays, caché… Et le coronavirus n’a pas aidé la situation. » Le pasteur Valley veut continuer à l’aider afin qu’il puisse obtenir un statut légal qui lui permettra de vivre en paix en Suisse.

Norbert Valley ne souhaite pas non plus abandonner sa lutte pour la modification de l’article 116 de la Loi sur les étrangers qui lui a valu sa condamnation. « Je vais continuer à m’engager dans ce domaine et probablement le faire via le Parti évangélique (PEV), avec pour objectif de promouvoir des lois plus justes et un meilleur partage des richesses entre les habitants de ce pays. »

« Ce qui est légal n’est pas toujours légitime ! »

Les deux ans de démêlés avec la justice ont permis au pasteur Valley de développer un discours rôdé par rapport à la pertinence de la désobéissance civile dans notre société. « Il faut toujours résister quand une loi est injuste. Souvent dans notre société, on confond ce qui est légal et ce qui est légitime. Les lois changent et elles ne sont pas toujours légitimes. » Et au pasteur Valley de citer l’exemple de la loi qui l’a condamné et qui, jusqu’en 2008 et sa révision, prévoyait, dans le domaine de l’aide aux étrangers, une exemption de condamnation pour motif de conscience. « Je ne peux dire aux gens que Dieu les aime et, lorsqu’ils sont dans la détresse, leur lancer simplement : ‘Au revoir et bonne suite !’ »

Lorsqu’on évoque devant lui des textes bibliques comme l’invitation à la soumission aux autorités à laquelle l’apôtre Paul enjoint dans Romains 13, Norbert Valley relève qu’il y a de nombreux récits ou textes de la Bible qui montrent qu’une autre attitude est possible. Les sages-femmes qui, avant l’exode du peuple hébreu, ont désobéi à Pharaon et n’ont pas assassiné les nouveau-nés mâles (Exode 1.15-22). Les apôtres qui, devant un tribunal, alors qu’on leur demandait d’arrêter de prêcher Jésus ressuscité, ont invoqué le fait qu’il fallait obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Actes 4.19). Et le pasteur de convoquer ensuite des grandes figures du protestantisme comme Marie Durand qui, dans sa prison de la tour de Constance à Aigues-Mortes (F), a écrit « REGISTER » (Résister) sur la margelle d’un puits d’approvisionnement. Comme la Hollandaise Corrie ten Boom qui a caché des juifs chez elle pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu’ils étaient pourchassés par les Nazis. « Chaque fois que l’on connaît ce genre de situation, il faut s’engager, quel qu’en soit le prix », souligne-t-il.

L’accueil du pauvre au cœur de 41 ans de pastorat !

Tout au long de ces deux ans de face-à-face avec la justice, Norbert Valley considère que la personne de Jésus-Christ a joué un rôle fondamental dans son engagement. « Lorsque j’ai rencontré personnellement Jésus, ce qui m’a bouleversé, c’est le Sermon sur la montagne dans l’évangile de Matthieu, et aussi le chapitre 25 de ce même évangile où Jésus nous dit : ‘J’étais étranger et vous m’avez accueilli’. Jésus-Christ est toujours là… et accueillir celui qui est dans la détresse, c’est toujours accueillir le Christ ! »

Pour celui qui a déjà 41 années de ministère pastoral derrière lui, l’accueil du pauvre, du marginal, a constitué le cœur de son activité de pasteur. « En 1979 déjà, avec mon épouse, nous avons accueilli au sein de notre famille des gens dans la détresse. Nous avons fait cela pendant 14 ans jusqu’au moment où nos enfants ont été adolescents et qu’il devenait compliqué d’accueillir des toxicomanes qui racontaient leurs différentes façons de faire du business avec de la drogue. »

Pour ce pasteur, l’accueil du marginal est le cœur de l’Evangile et aussi… le cœur de son appel et de son ministère !

Serge Carrel

2 réactions

  • sandrine Borgognon mardi, 26 mai 2020 16:29

    Je vous remercie pour cet article, je trouve Norbert Valley vraiment courageux et un exemple a suivre.
    Je suis contente que l'on expose l 'évangile en entier, les exemples cites concernant la désobéissance civile sont aussi important a exprimer que le verset de se soumettre aux autorités, car on a tendance a citer que ce verset la.
    Je trouve super sa determination. Malgré son épreuve avec la justice, il veut continuer a combattre le bon combat. je sens une force en lui pour la justice, l'authenticité et je remercie notre Dieu que des hommes courageux se battent non par défi ou non soumission ou rebelion mais pour l'équité, la justice par amour pour Dieu et pour son prochain. Je pense, mais cela et mon opinion, que pas beaucoup sont pret a payer le prix pour ce combat face a des lois injustes, et qui dans la fin des temp, ces lois injstes se multiplieront et poseront l 'enfant de Dieu face a des choix trop difficiles a résoudre, je sais pas si j'aurai eu le courage de Norbert valley qui a agit avec amour pour son prochain et dont la justice qui appelle le mal bien et le bien mal, l'as condamné a cause d'un article 116. merci de nous avoir partagé ce témoignage.

  • Simone Givel lundi, 01 juin 2020 21:31

    Merci M. N. Valley pour votre témoignage ferme que vous résumez en disant: "Je ne peux pas dire aux gens que Dieu les aime et, lorsqu'ils sont dans la détresse leur lancer simplement: Au revoir et bonne suite !" Les temps deviennent difficiles et, de plus en plus, nous chrétiens seront amenés à nous positionner avec fermeté. Simone Givel

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