A 50 mètres de sa chapelle, l'Eglise évangélique libre de Reconvilier (FREE) a ouvert un lieu d'accueil dans des locaux chargés d'histoire: la Lingotière, l'ancien foyer de l'usine Swissmetal-Boillat. Coincé entre un ruisseau et la voie de chemin de fer, le bâtiment ne paie pas de mine. Mais, à Reconvilier, tout le monde le connaît. En effet, il a abrité bien des réunions syndicales par le passé. C'est pourquoi, lors du conflit social et de la restructuration de l'usine en 2006, le foyer fut fermé, puis mis en vente.
Une bonne affaire à saisir
Flairant la bonne affaire, Marc et Claire-Lyse Luthi – le couple pastoral de l'époque – ont proposé à l'Eglise d'acheter le bâtiment. Réflexion et prière en Eglise... conseils et aide de la Fondation la Prévoyante... en mai 2010, la Lingotière est devenu la propriété de la communauté. Mais pour en faire quoi?
La réponse est venue plus tard. Depuis janvier 2011, l'ancien foyer de Swissmetal-Boillat est ouvert le mardi après-midi et le vendredi matin. Il est un lieu convivial ou chacun peut venir boire quelque chose, jouer aux cartes, rencontrer du monde, trouver une écoute... « Cela permet à l'Eglise évangélique libre de Reconvilier de sortir de ses murs, de rencontrer la population du village et de se mettre à son service », précise le pasteur Claude Bordigoni. Et les habitants de l'endroit se disent les uns aux autres: « Ah! La Lingotière... Ça rouvre! »
Des bénévoles enthousiastes
Durant les heures d'ouvertures au public, l'accueil est assuré par une équipe de bénévoles de l'Eglise libre. Certaines personnes sont formées en accompagnement et en relation d'aide. D'autres ont un don pour le service. « Nous n'avons pas eu besoin de supplier les gens de la communauté, s'enthousiasme Claude Bordigoni. Ceux-ci se sont proposés avec beaucoup de spontanéité. Une dame s'est engagée à venir tous les mardis après-midi. D'autres personnes ont promis de fournir des gâteaux et des tresses. »
Derrière le comptoir, près de la machine à café, Rose s'active : « J'aime le contact avec les gens, je ne suis pas une solitaire. Avant, j'ai exercé le métier de cuisinière. » Sa collègue Edith renchérit : « Depuis le temps que je rêve d'un lieu pour accueillir du monde... » Puis, désignant la grande terrasse enneigée, elle rêve déjà : « Cet été, on pourra griller* sur la terrasse... et peut-être même organiser des apéros de mariage. On aura des tas de possibilités d'accueillir, jusqu'à 150 personnes. »
En attendant ces jours fastes, les animateurs de la Lingotière se mettent à l'écoute des besoins des visiteurs. Des repas simples ? De l'aide scolaire ? Il faudra discerner, choisir, se lancer... Mais ce qui fonctionne déjà bien, c'est la location de la salle – avec sa cuisine professionnelle – à des groupes. « Nous avons déjà pas mal de demandes de location, se réjouit Claude Bordigoni. Elles viennent de clubs de marcheurs, de sociétés de musique, d'une chorale qui désire organiser des auditions, de familles qui célèbrent des événements... »
Une action de service
Ce qui intrigue, dans ce bâtiment géré par une Eglise, c'est l'absence de références religieuses. On ne trouve de versets bibliques ni contre les murs, ni sur les sachets de sucre. Il n'y a pas non plus de table de littérature avec bibles à deux francs, brochures d'évangélisation et publicité pour l'Eglise. « Ici, les gens de la communauté se mettent au service de leurs visiteurs, martèle Claude Bordigoni. L'engagement social n'est pas de l'évangélisation déguisée, mais un acte pour notre société. Et nous, chrétiens, avons un urgent besoin de poser des actes qui nous connectent à notre société. Mais si nos visiteurs nous posent des questions liées à la foi, nous répondons, bien sûr. »
En tous cas, l'expérience ne laisse indifférents ni le journal local, ni les autres Eglises. Tout récemment, le pasteur d'une Eglise évangélique voisine n'a-t-il pas proposé à Claude Bordigoni de l'aide et une collaboration ?
Claude-Alain Baehler
* En français du Jura bernois, « griller » ne signifie pas « se chauffer », mais « organiser un barbecue ». Nuance!
(1) Sous la plume de l’écrivain italien Giovannino Guareschi, Don Camillo est le curé du petit village italien de Brescello, où il se livre à une guerre d'influence avec Peppone, le maire communiste...
Chic, la lingotière reprend du service (article paru dans le Journal du Jura)