Nous y marchons toute notre vie et nous y finissons notre parcours une fois inhumés : qu’il le veuille ou non, l’être humain est étroitement lié à la terre. Différents aspects de sa vie lui sont d’ailleurs associés, comme la naissance, le fait de grandir, de porter ou non du fruit.
Pour beaucoup, Dieu s’y révèle, que ce soit au travers de la beauté des paysages ou par la puissance évocatrice de ce sol qui nourrit et permet la vie.
En marge de la campagne de Carême œcuménique intitulée cette année « Sans terre, pas de pain », Gabrielle Desarzens a rencontré plusieurs personnes pour interroger la dimension spirituelle de la terre et du rapport que les humains entretiennent avec elle.
Un lieu de promesses
Ensemble, ils évoquent la question de la propriété et de l’accaparement des terres dans les pays du Sud, principal sujet de la Campagne de Carême. Mais ils questionnent surtout notre rapport à la terre, ici, en Occident, dans nos sociétés sécularisées et urbanisées. Alexis Corthay, agriculteur à Meinier (GE), travaille la terre au quotidien, concrétement et patiemment, et s’en inspire aussi pour écrire des poèmes. Agronome sur l’île de Madadgascar, Parany Rasamimanana traduit l’importance de la terre pour un pays où 80% de la population dépend de son travail. Jérémie Forney, ethnologue fribourgeois et collaborateur scientifique à la Haute Ecole en agronomie de Berne, souligne que la terre est un lieu essentiel de création de sens. Enfin, l’éthicien genevois François Dermange évoque les promesses qu’elle contient, en termes de renaissance : « Le sens de notre vie est dans le printemps, pas dans l’hiver, estime-t-il ; dans ce qui naît, germe, grandit. » Et ce professeur de rappeler que le premier sens de Pâques est agricole : « C’est la fête du printemps, où on doit détruire ce qui reste de l’ancienne récolte, en particulier le levain, pour recevoir tout de façon nouvelle de la part de Dieu : c’est là le premier sens de Pâques. »
Entrer dans une terre promise
Si l’être humain vit aujourd’hui toujours plus dans un monde aseptisé et frénétique, il aspire à retrouver ce lien à la terre, souligne François Dermange, qui souhaite que Pâques soit l’occasion pour plusieurs d’entrer dans « une terre promise » : « Que l’on découvre un autre rapport à la nature, un autre rapport à soi-même. » Pour lui, la promesse du lait et du miel donnée aux Israélites s’oppose dans la Bible aux oignons d’Egypte, « c’est-à-dire à ce qu’on regrette, qui était cuisiné, qui était notre œuvre... mais qui ne nous nourrissait pas. » (c)
En ce début de printemps, une série d’émissions proposée par Gabrielle Desarzens dans A vue d’Esprit, sur RTS Espace 2, du 18 au 22 mars à 16h30 (à réécouter ou podcaster sous www.rts.ch/esprit).