Alfred Kuen est né en 1921. Il a grandi en Alsace dans une famille simple d’ouvriers. De ses parents il a hérité l’amour du travail, le goût d’une vie simple, le sens de l’hospitalité et le courage ! Ce sont là les qualités que je lui reconnais et qu’il a manifestées tout au cours de sa vie.
Du courage, il lui en fallu pour faire face aux différentes épreuves qu’il a traversées : décès de sa mère alors qu’il n’avait que 18 ans ; 5 ans d’éloignement avec ses camarades de l’École normale à Périgueux pour fuir les soldats allemands, puis réfugié en Suisse de 1943 à 1945 ; perte d’un fils de 27 ans tué dans un accident de voiture en 1977 ; pour ne rien dire du décès de son épouse Mimosa en 1990 à la suite d’un infarctus !
De retour à Strasbourg à la fin de la guerre, il se retrouve avec ses camarades chrétiens et fonde l’Église de la Bonne Nouvelle dont il deviendra le responsable jusqu’en 1975.
A Emmaüs
En même temps, il se consacre activement à la transcription du Nouveau Testament qui paraît en 1976 sous le nom de « Parole Vivante » et rédige son livre « Je bâtirai mon Église » qui retient l’attention des responsables de l’Institut Emmaüs à St-Légier. Ceux-ci l’engagent en tant que professeur en 1975, dès sa retraite de l’enseignement public français. Il ne prendra sa seconde retraite « officielle » que 30 ans plus tard ! Ce qui ne l’empêchera pas de poursuivre activement son activité rédactionnelle pratiquement jusqu’à la fin de sa vie.
Ces années passées à Emmaüs furent particulièrement favorables et stimulantes. Le contact quotidien avec des étudiants de plusieurs nationalités et d’appartenances ecclésiastiques diverses ; le travail collégial avec ses collègues ; la disponibilité directe de l’importante bibliothèque d’Emmaüs, pour ne rien dire des Editions Emmaüs dont il fut le directeur de 1985 à 2005, sont autant de facteurs qui ont contribué à son activité littéraire !
A tout cela s’ajoute son amour du travail ! Il ne perd pas une minute, trouve le moyen de faire plusieurs choses à la fois, par exemple pédaler sur son vélo d’intérieur ou marcher tout en relisant ses textes. On l’a surnommé : « L’homme qui écrit en marchant » !
Vulgarisateur et traducteur de la Bible
Alfred Kuen se distingue par ses écrits en rapport direct avec la Bible : il dirige la révision du « Nouveau dictionnaire biblique » (1972) ; il édite des séries de manuels à l’intention des étudiants : « Le métier d’étudiant » ; « Comment étudier la Bible » et « Comment interpréter la Bible » pour ne nommer que ces titres-là ! Il rédige au cours des années des introductions aux différents livres du Nouveau Testament et plus tard s’attèle à la rédaction d’une « Encyclopédie des difficultés bibliques » en 5 volumes, ainsi qu’une « Encyclopédie des questions ».
Il initie le projet de la traduction de la Bible en langage contemporain en collaboration avec plusieurs biblistes. Une première édition de la Bible du Semeur paraît en 1992, et une version révisée en 2000. Il prend également l’initiative de la rédaction des notes de la Bible d’étude Semeur 2000 qui rencontre un très grand succès.
Entre sujets controversés et développements sur l’Eglise
Il a le courage d’aborder des sujets controversés dans « Baptisé et rempli de l’Esprit », ou touchant au retour du Christ (« Jésus revient » ; « Le labyrinthe du millénium ») et le thème toujours d’actualité « La femme dans l’Église ».
Alfred Kuen est aussi un homme d’Église et de nombreux écrits touchent à ce thème : « Pourquoi l’Église ? », « Le culte dans la Bible et l’histoire », « Renouveler le culte ». Il aborde aussi la question de la structure de l’Église en traitant de ses responsables : « Le responsable : qualités et fonctions », « Ministères dans l’Église », etc.
La musique au cœur de sa vie
Une facette moins connue de la personnalité d’Alfred Kuen est son don musical et son intérêt pour la musique dans l’Église. Il y a consacré deux études : « Musiques I : évolution historique… » et « Musiques II : dans l’Église et dans la vie chrétienne ». En 1976 avec une équipe de collaborateurs, il publie à l’intention des jeunes le fascicule « Chœurs joyeux » qui rassemble des cantiques et des chœurs dont il est l’auteur ou le compositeur de plusieurs d’entre eux! Pour l’anecdote : il lui arrivait d’improviser un morceau de piano ou même un chant à la fin d’un culte ! Il dit s’être arrêté au bord de la route pour mettre par écrit quelques strophes de cantiques de peur que l’inspiration ne s’envole !
Un esprit de paix et le souci de l’unité
La force d’Alfred Kuen en plus de sa méthode efficace de travail, c’est d’avoir su s’entourer de collaborateurs fidèles et compétents. Ses livres ont l’avantage d’être accessibles, écrits dans un esprit irénique, donnant la parole aux uns et aux autres. Il n’exprimait son point de vue qu’avec modération, ce que certains lui ont parfois reproché !
Sa vie entière, Alfred Kuen l’a consacrée à la Bible, à sa traduction et à sa communication dans un esprit de paix et dans le souci de l’unité. Puisse l’Église d’aujourd’hui accueillir et poursuivre cet héritage !
Marc Lüthi, ancien directeur de l’Institut biblique et missionnaire Emmaüs (Saint-Légier)