Si le pays des Cèdres a connu 15 ans de guerre civile de 1975 à 1990, une gigantesque explosion dans le port de Beyrouth détruisait de larges quartiers de la capitale le 4 août 2020, à 6h07 précises. « C’est comme si l’histoire ou le temps s’était arrêté face à un paysage apocalyptique : la mort, la destruction, partout, raconte Fadi Daou. Il y avait aussi 6'500 blessés qui avançaient dans les rues devenues impraticables pour les ambulances et autres moyens de locomotion à cause des décombres. Des blessés portaient d’autres blessés plus gravement atteints et cherchaient un hôpital pour les accueillir. »
Réflexe salvateur
Mais les structures sanitaires elles aussi étaient, pour plusieurs, endommagées. Lors de l’explosion et dans l’un de ces hôpitaux, l’hôpital St Georges de Beyrouth, Pamela, une jeune infirmière de 26 ans, voit à côté d’elle tomber sa collègue. Mais elle pense tout de suite à la pièce d’à côté où se trouvent les enfants prématurés dans leur couveuse. Elle y court et trouve trois bébés en vie. Elle les prend dans ses bras et décide de marcher vers un hôpital qui soit encore en état de fonctionnement pour leur sauver la vie. « Elle les porte, souligne Fadi Daou. Et cette image devient le symbole de la volonté de vivre malgré tout. » Elle marche cinq kilomètres. Elle arrive dans cette autre structure hospitalière où la vie de ces tout jeunes enfants sera sauvée.
Marcher… pour sauver…
« Cet acte héroïque de Pamela et en même temps cette barbarie que nous avons connue avec cette explosion me font penser dans ce contexte de Noël au roi Hérode, explique le théologien libanais. Il a commis l’un des crimes les plus odieux de l’histoire de l’humanité : quand il a appris la naissance de Jésus, à Bethlehem, il a décidé d’assassiner tous les nouveaux nés, en espérant se débarrasser ainsi de cet enfant. Et Joseph avec Marie prennent cet enfant et ils marchent- comme Pamela - vers l’Égypte. Pour sauver la vie de celui qui deviendra le Sauveur de l’humanité.
… pour devenir des sauveurs
» Je pense à ces trois bébés dont la vie a été sauvée par Pamela, je pense à Pamela, je pense à tous ceux qui risquent leur vie pour sauver la vie des autres. Je pense à eux en espérant qu’ils deviendront un jour des sortes de sauveur de la société libanaise. Des personnes qui conjurent la mort et la violence dans lesquelles le Liban se trouve aujourd’hui. »
L’explosion de Beyrouth survenue en août 2020 a fait plus de 200 morts. L’enquête pour déterminer qui en sont les responsables continue de piétiner.
Gabrielle Desarzens
Fadi Daou a été interrogé pour Hautes Fréquences sur RTS La Première. De prochaines chroniques libanaises interviennent encore les 26 décembre, 2 et 9 janvier.