Derrière la baie vitrée de sa cuisine d’Echichens, Philippe Jobin contemple une partie de ses vergers. « Ce qui m’a décidé à entrer en politique, c’est la défense du métier, lance-t-il. Et si je suis entré à l’UDC, c’est parce que j’estimais que c’était le parti qui le défendrait le mieux. Vous me parlez de la défense des petits prônée par l’Evangile ? Mais les petits, ce sont parfois aussi les paysans ! »
Titillé sur les positions antimigratoires de son parti et sur le démantèlement de l’Etat social, il parle de la tendance paysanne de l’UDC qui essaie de trouver un chemin commun avec son aile la plus à droite. « Philippe ? Il me semble parfois déchiré suivant les options de son parti », indique son collègue socialiste Hugues Gander, qui travaille avec lui en binôme au sein de la Commission de gestion du Grand Conseil vaudois. « C’est quelqu’un qui viendra tout de suite en aide à une personne dans le besoin. » Les deux hommes s’entendent bien et fréquentent le même groupe interconfessionnel de députés qui se réunit une à deux fois par année. Une initiative qui réunit à chaque fois entre 15 et 20 personnes et qui a été mise en place à l’époque par Laurent Wehrli, syndic de Montreux et conseiller national PLR aujourd’hui.
La famille, une valeur sûre
Deux chrétiens évangéliques sur 150 députés, voire jusqu’à une quinzaine suivant le résultat des élections de fin avril, n’est-ce pas dérisoire ? Philippe Jobin hausse les épaules et estime que cela doit correspondre au pourcentage d’évangéliques dans le canton. Mais qu’ils soient évangéliques ou non, il est important pour lui que davantage de chrétiens s’engagent en politique, « car on va au-devant de problèmes éthiques essentiels ». Il met ses chaussures, sa veste, passe la porte vitrée et sort pour montrer son domaine. Dehors, appuyé à un arbre fruitier, il poursuit : « En politique, on peut apporter une patte, une impulsion qui peut être positive en fonction de ce qu’on véhicule comme valeurs personnelles. C’est important que, comme chrétiens, nous y soyons présents parce que nous faisons partie de la société et qu’on a des choses à dire. » Et notre homme de parler de combats qui lui sont chers comme celui d’une déduction fiscale accordée à un parent, homme ou femme, qui ferait le choix de rester à la maison pour s’occuper des enfants ; ou celui du refus d’une concentration urbaine, peu favorable selon lui à la vie de famille. Car cette dernière est essentielle à ses yeux.
Remises en question
A la tête d’un domaine agricole avec 6 hectares et demi d’arboriculture et 36 de grandes cultures (blé, maïs, colza, tournesol), Philippe Jobin consacre 80% de son temps à la politique. Responsable de son groupe au Grand Conseil vaudois, il est aussi municipal, notamment responsable des affaires sociales dans sa commune d’Echichens. Marié, père de 3 enfants, membre de l’Eglise évangélique l’Oasis (FREE) à Morges, il dit se remettre beaucoup en question. « Peut-être parce que j’évolue dans un milieu professionnel où il n’y a pas d’acquis », commente-t-il. S’il se nourrit de son terreau judéo-chrétien, il souhaite être un politique qui crée des ponts et qui sache faire preuve d’ouverture et de collaboration, « pour construire un avenir pour nos enfants », tient-il à souligner
Gabrielle Desarzens