Chers amis musulmans,
Je me permets de vous adresser, en cette période de Ramadan, les quelques réflexions qui suivent.
Avec des millions de vos « frères », vous aspirez à gagner la faveur d’Allah par votre piété. Et en ce mois de jeûne, vous renouvellerez votre engagement à suivre fidèlement les enseignements de votre religion.
Sachez qu’à cet égard, beaucoup de non-musulmans se posent une question : à quel islam allez-vous renouveler votre fidélité ? Nous sommes nombreux à vouloir croire que les musulmans vivant en Europe souhaitent (ou non) pratiquer leur foi, contribuer à la vie de la société, vivre en paix et assurer le meilleur avenir possible à leurs enfants.
Que répondez-vous aux appels à la rupture et au combat ?
Malheureusement, tous les musulmans ne partagent pas ces belles aspirations. Certains oulémas et intellectuels vous en font grief et, dans leurs enseignements, cherchent à vous faire adopter une tout autre attitude. Pour eux, vous ne serez de bons musulmans que si vous dénigrez le pays qui vous accueille, que si vous en critiquez les institutions comme non conformes à la charia, et que si vous vous engagez à soutenir le djihad. Ces hommes veulent vous entraîner dans un conflit avec l’Occident. A travers des discours violents, relayés jusque dans vos mosquées, ou par des discours trompeurs tenus dans les médias européens, ils pensent pouvoir instrumentaliser votre présence dans les pays où vous avez émigré pour y imposer l’islam par la ruse et la force. C’est cette stratégie à long terme qui éveille tellement de suspicion envers vous. Parler alors de « racisme » ou d’« islamophobie », comme le font ces prédicateurs, c’est en plus vous contraindre à prendre la posture de victimes quand, en réalité, les intentions de leurs cœurs sont hostiles.
Très concrètement, cela signifie que votre avenir en Europe va essentiellement dépendre de la réponse que vous donnerez à ces appels à la rupture et au combat. Or, ici, il est très important de rappeler un principe dont dépendent votre honneur de musulmans ainsi que la possibilité de faire société ensemble : le respect de la vérité. Voici deux exemples illustrant ce point.
La Bible falsifiée ?
Le premier est relatif à une accusation que la tradition islamique porte, depuis ses origines, contre Juifs et chrétiens. Ensemble, ils se seraient entendus pour falsifier leurs Ecritures afin d’en faire disparaître l’annonce de la venue du Prophète de l’islam, ce qui aurait obligé Allah à révéler le Coran pour remplacer ces Ecritures corrompues. En admettant un instant que cela soit vrai, comment se fait-il qu’aucune étude historique n’ait jamais établi où, quand et qui a conduit ce travail de falsification ? Et plus étonnant encore, comment tant de gens ont-ils pu croire une affirmation absolument infondée, simplement sur l’autorité de ceux qui ont répété à travers les siècles : « C’est ainsi parce que nous le disons » ?
Aujourd’hui, une simple visite du site qui propose la plus ancienne Bible complète (1) permet à quiconque veut s’en donner la peine de constater que le texte de ce parchemin du IVe siècle – trois siècles avant l’ère islamique – ne fait pas plus mention de Mahomet que le texte biblique actuel !
Ouvrir les yeux sur les violences de l’islam
Le deuxième exemple a trait à la violence dans l’islam. Pourquoi des intellectuels aussi réputés que Tariq Ramadan, prennent-ils tant de soin à cacher le fait que l’islam recourt à la violence pour s’imposer. Dans son livre L’islam, un autre nationalisme, Luiza Toscane rapporte des propos de Tariq Ramadan remontant aux années 90. A propos de Hassan Tourabi, artisan principal de l’islamisation du Soudan, il dit qu’il « a toujours été modéré » (2). Or Human Right Watch donne une image très différente de Hassan Tourabi. Au début des années 90, afin d’asseoir le pouvoir islamique et prévenir toute révolte, il a présidé à la formation d’unités de police et de milices qui « perpétrèrent beaucoup de violations des droits de l’homme, entre autres : exécutions sommaires, torture, mauvais traitements, détentions arbitraires, interdiction de la liberté d’expression, de la liberté de rassemblement et de la liberté religieuse, et violations des lois de la guerre... » (3). En 1994, Gaspar Biro, rapporteur spécial de la Commission des Droits de l’homme au Soudan, confirme la réalité de ces violences : « Il a été indiqué à plusieurs reprises depuis 1992 qu’un djihad, ou guerre sainte, avait été déclaré contre les non-musulmans et, en particulier, les chrétiens » (4).
Rejetez ces atteintes à votre honneur !
Dans Le génie de l’islam, Tariq Ramadan confirme son penchant à cacher la vérité quand il écrit que Mahomet n’a engagé de guerre qu’en état de légitime défense (5). De tels propos, absolument contraires à la réalité historique, ont pour effet de jeter le discrédit sur les musulmans. Biensûr, c’est un cas d’amalgame. Mais comment pourrait-il en aller autrement quand ceux qui se présentent comme les champions de l’islam authentique pratiquent un discours mêlant vérité et mensonge?
C’est aux musulmans eux-mêmes de rejeter ces atteintes à leur honneur. C’est à vous, amis musulmans, de vous exprimer contre ces hommes qui cherchent, de l’étranger ou d’ici, à vous entraîner dans un conflit qui ne vous apportera absolument rien, sinon souffrances et amères désillusions.
Christian Bibollet
Institut pour les questions relatives à l’islam
Notes
1 Le site du Codex sinaiticus.
2 Luiza Toscane, L'islam, un autre nationalisme, Paris, L'Harmattan, 1995, p. 205.
3 Human Right Watch, Biography of Turabi (mars 2002).
4 Gaspar Biro, Commission des Droits de l'homme, cinquième session, point 12 de l'ordre du jour provisoire.
5 Tariq Ramadan, Le génie de l’islam, Initiation à ses fondements, sa spiritualité et son histoire, Paris, Presses du Châtelet, 2016, p. 39.