« Dieu me précède dans mes visites. Il utilise ces rencontres pour renouer le contact avec des personnes qui crient à lui et qui le cherchent dans le doute. » Virginie Reichel a 48 ans. Infirmière de formation, cette mère de 3 jeunes adultes a repris voilà une année une activité d’aumônier à mi-temps au CHUV à Lausanne. Salariée par la Fédération évangélique vaudoise (FEV), elle a rejoint l’équipe d’aumônerie oecuménique de l’hôpital. Dans un contexte de pluralisme religieux reconnu, elle se rend au chevet de tous les patients des services qui lui sont confiés pour leur proposer conversation, écoute et accompagnement.
La tâche paraît rude, mais l’accueil est la plupart du temps ouvert du côté des malades. Assise à la cafétéria d’un des plus grands hôpitaux de Suisse romande, Virgine Reichel raconte avec des scintillements de contentement dans les yeux ses « rendez-vous divins ».
Une onction d’huile, puis le repas du Seigneur
« Il y a quelques semaines, une équipe soignante fait appel à mes services. Un de leurs patients est passé près de la mort et, depuis, il n’arrête pas de pleurer. » Au travers des contacts que Virginie Reichel noue avec lui, l’homme parvient à mettre des mots sur son vécu. Il a été bouleversé par le fait que Dieu le gardait en vie, alors qu’il était si près de la mort. Au fil des jours, Virginie apprend que ce malade a été exclu d’une Assemblée de frères à cause d’un mariage en dehors de son milieu religieux. L’aumônière lui propose ensuite une onction d’huile. L’homme y consent et souhaite partager le repas du Seigneur alors que cela fait 40 ans qu’il ne l’a pas pris. « Mon accompagnement permet tout simplement à des gens de retisser des liens avec leurs convictions de foi ou plus concrètement avec une Eglise », ajoute-t-elle. Au sortir de l’hôpital, ce patient n’en restera pas là. Il annonce qu’il fréquentera d’un peu plus près la paroisse réformée de son village...
Aller plus loin que l’empathie
Virginie Reichel goûte aussi parfois à une compassion particulière pour quelqu’un. « Une compassion qui dépasse largement la simple empathie à laquelle nous sommes tenus à l’occasion de nos visites », explique-t-elle. Il y a quelques mois, l’aumônière entre en relation avec une jeune femme blessée dans un accident de voiture. Dans l’accident, son bébé a trouvé la mort. Ce vécu remplit Virginie d’une compassion particulière à l’endroit de cette femme de religion musulmane. Et ce d’autant plus que les relations au sein du couple en deuil se détériorent. Sans tenir compte des désirs de la maman, le mari rapatrie le corps du bébé dans son pays d’origine et le fait inhumer en l’absence de la maman. « Nous avons vécu des moments forts le jour de l’enterrement, explique Virginie. Cette femme en deuil a accepté que nous priions ensemble et que nous goûtions à la consolation de Dieu... »
Accompagner pour faciliter l’acceptation du handicap
Depuis peu, Virginie Reichel a pris des initiatives dans un service de réhabilitation de personnes victimes d’un accident cardio-vasculaire. « J’ai réalisé qu’il y avait un manque dans l’accompagnement de ces patients qui ont pour la plupart entre 40 et 60 ans et qui passent entre 2 et 6 mois à l’hôpital. Notamment dans le suivi de l’intégration de leur handicap, passager ou définitif, à leur quotidien ». Sur le modèle de ce que fait déjà une de ses collègues dans un service d’orthopédie, Virginie propose à l’équipe soignante un accompagnement régulier de quelques patients. L’équipe réagit très positivement à cette offre. Depuis, l’aumônière salariée par la FEV est intégrée dans les horaires de soins et elle participe régulièrement aux colloques interdisciplinaires qui font le point sur l’état des patients.
« En fait, conclut Virginie Reichel, dans cet engagement d’aumônerie, je fais modestement ce que Jésus a déjà fait. Il parcourait les routes d’Israël-Palestine. Sur son passage, tout le monde n’était pas guéri, mais tous ceux qui se montraient ouverts à sa présence pouvaient le rencontrer ! »
Serge Carrel