Trois mois après son refus par le Conseil des Etats, la chambre basse de l’Assemblée fédérale a adopté jeudi 13 juin le contre-projet à l’initiative pour des multinationales responsables (109 voix pour, 69 contre et 7 abstentions). « L’économie suisse est de plus en plus divisée sur la question », commente Chantal Peyer, cheffe d’équipe à l’ONG Pain Pour le Prochain. Mercredi, plusieurs acteurs économiques d’importance avaient envoyé une lettre aux membres du Conseil national pour soutenir le contre-projet, soit la Fédération des entreprises romandes (45'000 membres), la chambre de commerce, de l'industrie et des services de Genève (CCIG), le STSA (lobby suisse des matières premières et traders, basé à Genève), le Centre Patronal et bien sûr le Groupement des entreprises Multinationales (92 membres) basé à Genève. Parallèlement, des investisseurs représentant 395 milliards d'actifs ont fait pareil en signant une « Déclaration pour un devoir de diligence obligatoire en matière de droits humains en Suisse ». Parmi eux, Safra Sarasin, mais aussi la caisse de pension du canton de Genève, celle du canton de Vaud et celle du canton de Neuchâtel.
Les multinationales, les colonisateurs d’aujourd’hui
Pour Dick Marty, co-président du comité d’initiative pour des multinationales responsables, le dossier est une affaire de justice : « J’ai moi-même été à plusieurs reprises dans ces pays fragiles, où il y a un paradoxe incroyable : ce sont des pays virtuellement très riches, comme par exemple le Congo RDC, où la population vit dans une grande précarité. Il n’y a plus la colonisation, mais celle-ci a été remplacée par des multinationales! » Rencontré à Loèche-les-Bains pour une émission diffusée sur RTS La Première, il avait ajouté : « Il faut maintenant pouvoir se regarder en face dans la glace et convenir qu’on ne peut pas bâtir notre richesse et notre avenir sur la pauvreté et les abus. Vous savez, quand il y un système de justice qui est introduit, tout le monde est vainqueur ! »
Le contre-projet doit retourner au Conseil des Etats en août.
Gabrielle Desarzens